Yves Contassot interpelle le Maire de Paris sur la taxe de balayage
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Yves Contassot

La taxe de balayage à laquelle les collectivités ont préféré le financement du nettoiement par la fiscalité locale traditionnelle est pourtant appliquée à Paris. Cette taxe qui a pour spécificité de n’être payée que par les contribuables dont l’immeuble donne sur la rue est aujourd’hui augmentée au tarif le plus haut pour l’ensemble des redevables, sans distinction de revenus. Sans pour autant assurer une meilleure gestion du nettoiement des rues à Paris.
La proposition qui nous est faite aujourd’hui d’aligner l’ensemble des rues de Paris sur la première catégorie n’est pas tout à fait nouvelle pour moi. En effet, lors de la révision de 2004 cet alignement avait déjà été envisagé.

Voir l’intervention d’Yves Contassot en vidéo

Or, à l’époque, il avait été largement admis qu’un tel alignement serait antisocial compte tenu de ses effets sur les catégories sociales les plus pauvres.

Car s’il est vrai que certaines rues ou portions de rues de quartiers populaires sont en catégorie 1 et inversement, cela reste globalement marginal et il y a une certaine corrélation entre le standing social des rues et leur catégorie.

Les maires d’arrondissement et les Conseillers de Paris auraient sans doute été heureux d’avoir la carte détaillée du classement des rues et on a du mal à comprendre pourquoi cette délibération n’a pas été inscrite à l’ordre du jour des conseils d’arrondissement avec les cartes annexées. A moins de craindre évidemment que la transparence en la matière ait conduit à la même conclusion que pour l’augmentation des tarifs des équipements sportifs…

Lorsqu’on est sur de soi, on n’hésite généralement pas à donner tous les chiffres. Or cette délibération mentionne uniquement une moyenne de 26 € par redevable.

Pourtant un simple calcul suffit à afficher l’augmentation pour les plus pauvres qui passeront de 1,17€ à 9,22€ : cela fera 788 % d’augmentation ! Connaissez-vous quoi que ce soit qui augmente dans une telle proportion ?

Il est pour le moins curieux que les Conseillers de Paris n’aient pas un document indiquant le nombre de redevables par catégorie afin de mesurer l’impact réel de l’alignement proposé. Pourquoi une telle volonté d’opacité ?

La seule information qui nous a été donnée en 4e commission est que 80% des redevables subiront une augmentation. C’est donc l’immense majorité d’entre eux qui seront touchés.

Il est vrai que cette taxe de balayage est aussi ancienne que mal conçue.

Le nettoiement des rues est censé être assuré par le produit de cette taxe. Très bien. Mais alors pourquoi limiter la taxe aux seuls immeubles donnant sur les rues. Leurs occupants seraient donc les seuls à salir Paris ?

La loi prévoit également de limiter la largeur des rues dont le nettoiement est financé par la taxe à 6m. Mais qui paie donc le nettoiement des rues très larges comme l’Avenue Foch ou mieux encore l’Avenue des Champs-Élysées, avenue qui bénéficie d’un traitement tout à fait exceptionnel avec des équipes permanentes puisque c’est la seule rue de Paris dans laquelle le Préfet de police interdit l’installation de poubelles. En fait ce sont les contribuables qui paient pour les riverains dans les rues les plus larges.

De plus la loi ne tient pas du tout compte de la production des souillures par les riverains. Ainsi certains établissements spécialisés sur la vente à emporter sont bien connus pour générer de nombreux déchets de toute sorte qui contribuent fortement à salir les rues. Or non seulement ces commerces ne paient pas davantage que les autres riverains, mais plus encore ils sont scandaleusement exonérés de la redevance spéciale pourtant due par toutes les entreprises et les commerces hors commerces de bouche.

Certes ces dispositions sont prévues par la loi. Mais quand la loi est stupide, on n’est pas obligé de l’appliquer quand d’autres solutions sont possibles.

L’incohérence de la taxe de balayage est telle que la plupart des villes ont renoncé à utiliser cette taxe et ont préféré financer le nettoiement par la fiscalité locale traditionnelle.

Il s’agit à l’évidence d’une solution de justice et de bon sens.

Justice car il n’est pas normal que seuls 70% des immeubles paient la taxe de balayage.

Justice car il n’est pas normal que certains aient droit à une propreté meilleure que d’autres.

Bon sens car il serait logique que tout le monde paie pour le nettoiement de Paris.

Bon sens car le financement du nettoiement ne peut être assuré par la seule taxe de balayage.

Enfin, il est certain que l’augmentation prévue de la taxe de balayage n’a pas pour objectif d’améliorer de façon proportionnelle la propreté de Paris. Il est évident qu’une partie des recettes supplémentaires sera versée au budget général de la Ville. Nous avons appris que pas un seul balayeur supplémentaire serait recruté. On nous dit qu’on va acheter du matériel. Fort bien mais qui le fera fonctionner ? Nous ne pouvons cautionner cette augmentation d’autant que les sommes inscrites au BP de la Ville pour la rubrique 813 « propreté » ne cesse de décroître passant de 33M€ en 2003 à 22M€ en 2011…. De plus les documents fournis à l’occasion du vote du budget primitif de 2011 ne correspondent pas aux 199M€ annoncés pour le compte administratif de 2010.

Cela pose une question essentielle : soit c’est la TEOM qui finance la propreté ce qui serait illégal et dans ce cas il faudrait diminuer la TEOM du montant trop perçu, soit le montant annoncé au BP ne correspond en rien aux coûts réels et ce serait tout aussi inquiétant.

De fait on constate que le cumul propreté et déchets correspond bien tant en recettes qu’en dépenses au même montant. Cela indique donc que le surplus de recettes de la taxe de balayage qui nous est proposé servira au budget général et en rien au nettoiement des rues. D’ailleurs il nous a été dit récemment que seule la moitié des 30M€ supplémentaires serait affectée à l’amélioration de la propreté. Nous ne pouvons donc cautionner cette augmentation de la taxe de balayage qui va servir à augmenter les recettes de la ville.

Non pas que nous sommes contre l’augmentation de la fiscalité en soi. Mais nous sommes pour une fiscalité juste et transparente. Si vous souhaitez augmenter de 30M€ les recettes de la Ville, faites porter cette augmentation sur la taxe foncière mais pas sur la taxe de balayage. Nous serons alors à vos côtés.

Vous l’avez compris nous voterons contre cette délibération et nous vous suggérons de supprimer purement et simplement cette taxe pour intégrer les sommes équivalentes à la taxe foncière.

Cette réforme serait juste et équitable, elle serait transparente, elle serait moderne.

Je vous remercie.

 

Yves Contassot, conseiller de Paris pour le 13e